Lettre de veille économique agricole spéciale marchés 2024
Grandes cultures
Les producteurs de grandes cultures ont connu une année 2024 très compliquée en termes d’opérations culturales comme de résultats économiques. Seuls ceux qui produisent des cultures industrielles peuvent espérer tirer leur épingle du jeu. La campagne, marquée par un enchaînement d’épisodes météo contrariants, se solde par un manque conjoncturel de volume de grains sans envolée des prix. Cet accident crée une onde de choc dans les organismes stockeurs (OS) dont le modèle économique repose sur la couverture des charges de structure par la marge sur les volumes travaillés. Dans le même temps la tension sur les trésoreries des exploitations à l’issue de deux campagnes difficiles complique le financement des approvisionnements 2025. Certains OS très engagés dans l’avance de trésorerie pour maintenir leur activité agro-fourniture sont pris dans l’étau de ce double phénomène. On peut s’attendre à ce que l’écart entre les prix payés aux producteurs et les cotations sur les marchés mondiaux s’accroissent.
Les rendements des grandes cultures sont en baisse tendancielle sous l’impact d’une fréquence accrue d’aléas météo et du caractère progressif et parfois difficile de la transition des itinéraires culturaux (molécules interdites, sols qui s’épuisent…). Concevoir un système plus robuste est une préoccupation de plus en plus fréquente, l’accroissement de surface à système identique ne suffisant plus à compenser la tendance négative.
Les fruits
En fruits, les récoltes ont été plutôt satisfaisantes en volume mais la météo a parfois affecté la qualité. Dans ces filières, toute stratégie d’accroissement des volumes est conditionnée par la hausse de la consommation. La création variétale est mobilisée pour proposer de nouveaux segments de marché et créer des offres gustatives plus marquées et reconnaissables par les consommateurs. Tout au long de la filière, cette démarche sur la diversité variétale intègre les questions d’échelonnement de la production, de gestion des risques de marché et de contraintes logistiques.
Le lait
Côté élevage, pour la première fois depuis 3 ans, la production laitière a progressé en 2024. Le secteur laitier connaît une baisse de volume tendancielle consécutive à l’accélération de la baisse du nombre d’exploitations et du cheptel. L’augmentation de production par exploitation se poursuit mais la saturation croissante de la main-d'oeuvre ralentit le processus d’agrandissement, épuise les producteurs, même les plus performants. Les opérateurs de transformation s’inquiètent de la déprise et cherchent à consolider le prix du lait payé aux agriculteurs en recherchant un mix produit à plus forte valeur ajoutée, quitte à s’alléger en volumes mal valorisés. D’autant plus que la filière poursuit les objectifs d’amélioration de sa performance carbone.
La viande
En viande, la production s’est redressée en 2024, marginalement en bovins, légèrement en porc et significativement en volaille après 3 années très marquées par la grippe aviaire. L’année est plutôt bonne pour les ateliers d’élevage mais avec d’importants écarts de résultats et une pression sanitaire importante sur la campagne à venir. Les entreprises d’abattage et transformation se trouvent confrontées à une perspective moyen terme de baisse des volumes travaillés qui se traduit par des fermetures de sites et augure une compétition accrue pour se maintenir.
La consommation française s’érode et se transforme : le développement de la consommation hors foyer et les évolutions sociétales modifient les types de viande recherchés et les modes de valorisation. Cela ne bénéficie globalement pas aux labels et viandes à valeur ajoutée et favorise en théorie les viandes importées. Dans ce contexte, la filière doit trouver une stratégie d’image de la production locale pour peser sur les arbitrages des secteurs de la restauration collective. Les concessions prévues dans le cadre de l’accord de libre-échange avec le Mercosur apparaissent alors particulièrement pénalisantes et à contre-courant de la transition agro-écologique visée en Europe et en France.