Paroles d'entreprise
Bien préparer sa retraite
Publié le 08.06.2022
Paroles d'entreprise : un départ en retraite serein
Après des années de salariat dans une entreprise de menuiserie, Gilles Raguet décide à 38 ans de créer son propre atelier. Au fi l des années, il recrute de la main-d’œuvre et se plait à diriger une entreprise à taille humaine avec des valeurs de confi ance et de solidarité. En 2021, il prend sa retraite en toute sérénité, ayant anticipé son départ et préparé la continuité de son entreprise.
Salarié pendant une vingtaine d’années au sein de l’entreprise de menuiserie Jean Glotin à Campbon, Gilles Raguet décide, en 1999, de s’installer à son compte. Il a alors 38 ans et son premier local est son garage. Très vite, le bouche à oreille fonctionne et le pousse à investir dans un local professionnel. Son activité se développe durant plus de vingt ans et l’entreprise emploie une dizaine de salariés au moment de sa transmission. Gilles s’était pourtant juré au départ de ne pas embaucher !
La menuiserie Raguet propose, au sein de son atelier, la fabrication d’escaliers, de petits meubles et de solutions d’agencement intérieur qu’elle livre à domicile. Elle réalise également différents travaux de menuiserie extérieure (portes, fenêtres...) et de charpente. Au moment de faire le bilan de cette riche carrière professionnelle, il en ressort la fierté d’avoir fait de l’Atelier Raguet une entreprise familiale, avec comme maître mot le respect de chacun : « J’ai toujours considéré que pour bien travailler, il fallait pouvoir le faire dans de bonnes conditions matérielles mais aussi dans une bonne ambiance. J’ai accordé beaucoup d’importance à ce qu’il règne une bonne entente dans l’entreprise, pour le bien de tous ». Il considère d’ailleurs ses salariés un peu comme ses enfants. Outre leurs compétences techniques, Gilles apprécie la convivialité et la solidarité qui règnent dans l’équipe. Pour les 20 ans de l’entreprise, il propose à chacun de réaliser un jeu en bois (palet, molki, grenouille...) et les accompagne dans leur création. Les clients invités ont ainsi pu découvrir leur savoir-faire tout en se divertissant. À l’été 2021, Gilles laisse les manettes de l’entreprise à Antoine, son fils, et Firmin, l’un de ses salariés. Pour remercier toute l’équipe qui l’a accompagné dans la bonne marche de la société, il organise un long week-end surprise sur la presqu’île de Quiberon afin de fêter ensemble son départ en retraite !
Une transmission progressive et rassurante
C’est donc le 1er septembre 2021 que la passation a eu lieu, soit 3 mois après les 60 ans du dirigeant qui coïncidaient avec sa possibilité de faire valoir ses droits à la retraite. Point d’orgue d’un projet de transmission d’entreprise bien géré car anticipé. Antoine a intégré l’entreprise familiale 6 ans auparavant avec l’ambition de prendre la relève, après avoir fait ses armes durant une dizaine d’années chez un charpentier du territoire. Il y retrouve Firmin, camarade de BTS, avec qui il évoque très rapide-ment le projet de s’associer pour faire perdurer l’histoire de l’Atelier Raguet. Progressivement, Gilles les intègre à la gestion de l’entreprise, en leur déléguant le chiffrage des chantiers. Ce fut également le cas lors de l’extension du bâtiment, qu’ils ont pensée et réalisée ensemble. « Je pense que cela leur a permis de se projeter et de poser la première pierre de leur projet » analyse Gilles. Durant les deux années qui ont précédé la cession du fonds de commerce, Antoine et Firmin ont géré l’entreprise sous le contrôle de Gilles, avec l’appui administratif de sa femme. Ce processus d’intégration a rassuré toutes les parties, notamment les salariés, avec qui les échanges ont toujours été transparents. Elle a même été providentielle. Gilles nous confie : « Début 2021, lors de la pose d’un escalier, j’ai fait une mauvaise chute qui m’a occasionnée des blessures au dos, au coude et au pied. Durant ma convalescence, j’étais particulièrement soulagé de pouvoir compter sur Antoine et Firmin ».
Un départ préparé et accompagné
Parallèlement à l’intégration de ses successeurs, Gilles a préparé son départ. La première démarche a été de faire un « point retraite » pour connaître la date potentielle de son départ en retraite. S’en sont suivies les autres étapes de la transmission, à savoir la valorisation du fonds de commerce (il s’agit d’une entreprise individuelle), le choix du schéma juri-dique et l’analyse des conséquences fiscales et sociales de la cession. Pour cela, Gilles a été épaulé par son conseiller, Jean-Yves Passelande, avec qui une relation de confiance s’est installée au fil des années : « Jean-Yves est parti en retraite peu de temps avant moi. Il avait tout préparé pour que cela se passe au mieux. Même en retraite nous restons en contact mais nous ne parlons plus de comptabilité ! » Après quelques mois d’une nouvelle vie de retraité, Gilles nous confie : « Au début ça fait bizarre de ne plus entendre le téléphone sonner comme avant ». La carrière de ce fidèle compagnon de l’artisan prend fin en même temps que celle de son propriétaire… Ce qui n’empêche pas les journées d’être bien remplies : « Le canapé, très peu pour moi ! » s’exclame-t-il. Pour compenser, Gilles se tourne sans hésiter vers ses passions pour lesquelles le temps manquait auparavant. La principale d’entre elles : le vélo. Il y consacre deux sorties hebdomadaires avec ses amis du club de cyclo local ainsi qu’une sortie en tandem avec Pascale, son épouse. « Le tandem demande un temps d’adaptation mais quel bonheur de pouvoir discuter librement et en sécurité, tout en mutualisant l’effort ! » Il profite également de la campagne de Blain pour faire de longues balades en forêt et ramasser des champignons à la belle saison. Sa résidence secondaire, dont il dispose avec son épouse à Pénestin (56), occupe aussi une part de leur temps. C’est souvent l’occasion de s’y retrouver en famille ou entre amis « pour la plupart eux aussi retraités » et de jouir des plaisirs du bord de mer. Il le concède aisément : « Après plus de vingt ans à ne pas compter ses heures de travail, prendre le temps est un confort non négligeable ».
Une passion du métier toujours présente
La page de l’entreprise est-elle complètement tournée ? Pas tout à fait… Gilles entretient toujours des contacts amicaux avec certains de ses clients fidèles. Et forcément avec ses anciens salariés. « Je leur apporte de temps en temps des terrines que je fais, en échange d’un café avec eux durant leur pause. Et, parfois, je leur prépare un repas le vendredi midi qu’on mange ensemble sur une grande table dans mon garage ». On ne referme pas comme ça le livre d’une gestion d’entreprise réussie. De plus, Gilles aime mettre à profit son temps libre et ses compétences pour rendre service à ses amis. Il a participé, par exemple, à la construction de ruches pour un ami apiculteur : « C’est aussi ça la retraite : pouvoir prendre le temps de travailler le bois comme j’aime le faire, mais sans la contrainte de devoir le faire dans un temps imparti ».
Mais d’où lui vient cette sérénité ? Car c’est bien ce mot qui caractérise le mieux Gilles lorsqu’on évoque avec lui son parcours et son processus de départ en retraite : « Il faut prendre le temps de bien préparer son projet en amont. À la fois pour que les repreneurs puissent s’intégrer convenablement, pour que les salariés soient rassurés sur la continuité de l’activité et pour que le dirigeant qui part en retraite puisse se projeter progressivement ».